L'héritage de Victoria (Villa Ocampo)

- Calle Elortondo 1811, San Isidro

Les derniers rayons du soleil éclairent la façade récemment ravalée. Les gravillons crissent sous les pas des derniers promeneurs. Au détour des allées, à l'ombre d'ombus ou d'araucarias séculaires, des bancs s'offrent aux amoureux pour d'ultimes moments de confidences avant de replonger dans le brouhaha de la ville.Venu pour contempler les oeuvres d'art exposées à l'intérieur de la propriété ou pour goûter la fraîcheur du parc dessiné par Don Manuel Ocampo (père de Victoria), le visiteur occasionnel ne pourrait imaginer que le toit de cette belle demeure fut ravagé 3 ans plus tôt par un terrible incendie, alors que débutaient les travaux de sa restauration.La volonté, la passion d'une équipe placée sous la tutelle de l'Unesco a permis que survive la maison de celle qui "consacra sa fortune, ...considérable, à l’éducation de son pays et de son continent". Borges ajoutait d'ailleurs à titre personnel :"…J’ai une grande dette envers Victoria ..., mais je lui dois beaucoup plus en tant qu’Argentin. »
Victoria (1) s'était installée définitivement dans cette maison en 1942. Des noms prestigieux du monde des arts en avaient franchi le seuil depuis longtemps déjà. Ils y étaient venus chercher le calme propice à l'inspiration. Ils y avaient trouvé la fascination qu'exerçait cette femme, devenue peu à peu leur muse et leur protectrice.
Rabindranath Tagore écrivait à la fin de sa vie qu'il "ne (connaissait) pas sa langue mais ce que lui disaient ses yeux (perdurerait) toujours, éloquents dans leur angoisse". Hermann Keyserling avouait qu'il "s’était senti asservi par la femme la plus spirituelle (qu’il n’avait) jamais connue".
Mais le plus bel hommage fut celui de Borges peu après la mort de Victoria, en 1979 : "Elle vécut avec courage et pudeur sa propre vie... Elle posséda dans son plus haut degré la grâce que le ciel ne voulut pas me donner".

(1) Ramona Victoria Epifanía Rufina Ocampo, dite Victoria Ocampo (1890-1979)

Projet Villa Ocampo
www.villaocampo.org

- Remerciements : Neda Ferrier (projet Villa Ocampo - Unesco) qui m'a permis de découvrir ce lieu.